> Célébration de Matari'i en Polynésie
> Conférences
> Évènements
Le ciel du monde polynésien
La célébration de Matari'i à Tahiti

 

A la "une" de La Dépêche

Coupure de presse

L’anthropologue Louis Cruchet se réfère à la carte du ciel pour étudier les marae polynésiens, selon les principes de l’ethnoastronomie.  La semaine dernière, il a établi un plan d’orientation du marae Nuutere, à Vairao, qui, comme 50 % des sites des îles de la Société, n’aurait pas été construit au hasard.  Ce point de repère astral suggère de multiples hypothèses, s’agissant de la spécificité des cultes, ou encore des légendes locales associées.
La semaine dernière, le scientifique s’est rendu sur le marae Nuutere, à Vairao, pour effectuer quelques relevés, en vue d’établir une orientation astronomique du site, sur la base d’un ancien tracé, supposé fidèle à la construction initiale.
“Il faut positionner le nord vrai, c’est-à-dire le nord astronomique, qui, à Tahiti, diffère de 12,5° par rapport au nord magnétique. On peut alors définir l’orientation du marae par rapport aux étoiles connues des Polynésiens”, précise-t-il quant à l’élaboration et à la lecture du plan.
L’orientation à 240,5° du mur le plus rectiligne en direction de la mer semble indiquer Antarès, ou ’Anamua, à moins de deux degrés près au coucher.
À partir de ce premier constat, les pistes de réflexion sont multiples. “J’ai remarqué que les marae orientés vers le coucher étaient dédiés aux ancêtres, tandis que le lever était associé aux dieux”, souligne Louis Cruchet, qui profite de la présence sur place de quelques élus et résidents de Vairao pour s’interroger sur la présence ou non de sépultures à proximité, susceptible de confirmer la première hypothèse.
Au fil de la discussion, le scientifique découvre que la constellation du Scorpion, dont fait partie Antarès, serait associée à l’hameçon de Maui, pouvant confirmer que l’orientation du site ne serait pas due au hasard. “C’est autant un repère dans l’espace que dans le temps, puisqu’Antarès est visible pendant la saison fraîche, et non pendant la saison humide, comme en ce moment, ce qui est aussi une façon d’établir un calendrier”, précise Louis Cruchet.

De la navigation à la construction
La symbolique de l’hameçon est d’autant plus forte que, dans la tradition polynésienne, les marae sont assimilés à des pirogues de pierre. “D’ailleurs, il y a certains marae sur lesquels on dépose des pagaies, comme aux Australes. Pour moi, ce ne serait pas seulement une métaphore, mais une réalité, confirmée par les étoiles”, souligne-t-il.
Points de repère pour la navigation, les astres pourraient tout aussi bien l’être pour la construction des lieux de culte. Dans les îles de la Société, la moitié des marae seraient ainsi orientés, et davantage encore aux Australes.
Pourtant, ces pistes de réflexion sont loin de faire l’unanimité. “L’archéoastronomie n’est pas une science reconnue en métropole, ni en Polynésie française, mais elle l’est davantage dans les pays anglo-saxons. L’objectif, en fin de compte, c’est de mettre à la disposition des Polynésiens des connaissances scientifiques qu’ils puissent s’approprier, pour une meilleure compréhension des pratiques ancestrales”, précise Louis Cruchet.
Les mystères des marae sont donc loin d’être entièrement résolus. Le scientifique s’emploie à approfondir ses recherches, non sans une certaine admiration pour les ingénieurs de l’époque. “Je tiens toujours à souligner l’intelligence avec laquelle les Polynésiens ont pu réaliser tout cela sans boussole, ni mathématiques”, confie-t-il. “Simplement par l’observation et les méthodes empiriques, ils ont réalisé des prouesses.” 

A.-C.B.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

retour haut de page | Mise à jour 2009 | crédits | ciel.polynesien@mail.pf